Des chercheurs suisses inventent un simulateur quantique d'un nouveau genre
Les physiciens suisses Andreas Läuchli et Andreas Elben, en collaboration avec des chercheurs de Google et d'universités de cinq pays, ont développé et testé avec succès un simulateur quantique d'un nouveau genre. Le simulateur quantique numérique-analogique vise à calculer des processus physiques avec une précision encore jamais atteinte.

Les deux physiciens suisses Andreas Läuchli et Andres Elben de l'Institut Paul Scherrer (PSI) ont réussi, en collaboration avec des chercheurs de Google et d'universités de cinq pays, ce que personne n'avait réussi auparavant. Ils ont développé un simulateur quantique numérique-analogique d'un genre nouveau. Selon le communiqué du PSI, ce simulateur doit permettre de calculer avec précision des processus physiques tout en étant applicable à une multitude de questions, allant de la physique des solides à l’astrophysique.
Combinaison du numérique et de l'analogique
Le cœur du simulateur est une puce quantique développée par Google et dotée de 69 bits quantiques supraconducteurs (qubits). Pour rappel, les bits quantiques permettent des modes de fonctionnement à la fois numériques et analogiques. Les ordinateurs numériques quantiques utilisent donc des portes quantiques universelles qui ressemblent aux portes logiques des ordinateurs classiques. La différence réside dans le fait que les qubits peuvent prendre non seulement les états 0 et 1, mais aussi des états intermédiaires, grâce à la superposition de la mécanique quantique.
Mais le potentiel des simulateurs quantiques purement numériques est encore limité. En revanche, les simulateurs analogiques permettent de reproduire directement les interactions de la mécanique quantique. Pour la première fois, les chercheurs sont parvenus à combiner les deux procédés.
Selon le PSI, le mode numérique du nouveau simulateur quantique définit des conditions initiales discrètes et peut déterminer l'état initial d'un processus physique de manière précise et flexible. Le mode analogique simule ensuite, via les interactions des qubits, la dynamique physique telle qu'elle se produit dans les corps solides réels. Pour illustrer le processus, on peut prendre l'exemple de l'apport de chaleur dans un corps solide, écrit le PSI. Le mode numérique peut définir que des pots à lait placés à cent endroits différents font couler du lait froid de manière ciblée dans une tasse de café chaud. Le mode analogique simule ensuite le processus de répartition du lait dans le café, par exemple en tenant compte de la propagation de la chaleur.
«Nous sommes en mesure de regarder le simulateur quantique lorsqu’il passe dans l’équilibre thermique, explique Andreas Elben. «Nos travaux montrent que des processeurs quantiques numériques-analogiques supraconducteurs peuvent être montés sur une puce électronique pour servir de simulateur quantique», souligne pour sa part Andreas Läuchli.
Simulateur quantique universel
Contrairement aux modèles analogiques, qui ne sont adaptés qu'à une seule question physique spécifique, le simulateur quantique nouvellement développé doit pouvoir répondre à plusieurs questions. Outre la thermodynamique, il est par exemple possible d'étudier le magnétisme, toujours à l’aide de la puce quantique de Google. Selon le PSI, les qubits y sont disposés en rectangle et, à l’état initial, leurs directions magnétiques présentent une alternance stricte. En outre, le simulateur quantique numérique-analogique pourrait aider à développer de nouveaux matériaux, comme des supraconducteurs à haute température ou des médicaments qui agissent avec plus de précision.
Les simulateurs quantiques sont également très demandés en astrophysique. Ils pourraient aider les chercheurs à trouver une réponse à la question de savoir pourquoi il y a une perte d'information dans les trous noirs.
«Notre simulateur quantique ouvre la porte à de nouvelles recherches. Nous faisons également office de pourvoyeurs d’idées pour de nouvelles expériences aux grandes installations de recherche du PSI, explique Andreas Läuchli. Et nous épaulons les scientifiques qui mènent leurs expériences à ces installations, lorsqu’ils doivent interpréter des résultats inattendus. Or pour ce faire, nous allons utiliser à l’avenir de plus en plus des simulateurs quantiques», promet Andreas Läuchli.