Ecole 42 Lausanne: 138 apprentis-développeurs dans la piscine inaugurale
Près de 140 apprentis-développeurs dont un quart de femmes ont rejoint la première piscine d’Ecole 42 Lausanne. Pendant un mois, elles et ils vont en découdre avec la programmation, sans professeur, mais avec l’aide de leurs camarades. Les meilleurs seront retenus pour entamer une formation de développeuse ou de développeur. Nous avons recueilli les motifs et premières impressions de trois candidats, 24 heures après leur entrée dans la piscine.
L’Ecole 42 Lausanne est lancée. 138 aspirants développeurs ont rejoint lundi «la piscine»: un mois d’apprentissage collectif intensif au cours duquel ils vont s’initier à la programmation. Deux autres piscines suivront en août et septembre avec à chaque fois quelque 150 étudiants. A l’issue de chaque piscine, les meilleurs développeurs en herbe seront retenus pour la véritable rentrée de l’école début octobre.
Et ils auront droit à une formation inédite, puisque le concept d’Ecole 42, qui a démarré à Paris et qui compte aujourd’hui des antennes dans le monde entier, repose sur l’apprentissage du développement informatique peer-to-peer et sans professeur. Au fil des défis et des stages en entreprise, les apprentis vont acquérir des compétences en programmation et des spécialisation (cybersécurité, data science, etc.).
L’Ecole 42 se distingue aussi par le fait qu’elle est gratuite. Les instigateurs de l’antenne lausannoise Serge Reymond (ex-Tamedia) et Christophe Wagnière (ex-HES-SO) sont parvenus en une année à fédérer un écosystème de soutiens locaux (Banque cantonale vaudoise, Romande Energie, Centre patronal, FER, CVCI) et de nombreux acteurs du numérique (Swisscom, Open Web Technology, Qoqa, Infomaniak, API, Softcom, Camptocamp), auprès desquels l’argumentaire de la pénurie d’informaticiens a sans doute fait mouche.
>Lire l’interview que nous avions réalisée avec les porteurs du projet lors de son lancement
Les apprentis qui rejoignent l’une des piscines d’Ecole 42 sont déjà passés par une première phase de sélection en ligne pour tester leurs aptitudes au domaine qui les attend. Ils vivent pour la plupart en Suisse romande et ils ont en moyenne 28 ans - ce qui prouve que la formation attire aussi des personnes en reconversion, commente Christophe Wagnière. Le directeur de l’école précise ne pas connaître leurs parcours préalable, de manière à éviter que cela pèse sur la sélection. En matière de parité, on est loin du compte puisqu’un candidat sur quatre est une femme, mais ce chiffre reste très élevé pour une filière informatique.
Durant un mois, ces hommes et femmes, jeunes et moins jeunes vont donc en découdre quasi nuit et jour avec des défis de programmation à résoudre en s’entraidant, ponctués par des examens individuels. A leur disposition 200 iMac et un espace tout équipé de 650 m2 dans les locaux de la Fondation Inartis à Renens qui héberge également des start-up. C’est là que notre rédaction a recueilli les attentes et les premières impressions de trois apprentis-développeurs lors de leur deuxième journée de piscine.
Trois jeunes dans la piscine
A échanger avec trois étudiants, il apparaît que le domaine de la programmation ne leur est pas totalement étranger. Agé de 19 ans, G. vit en France voisine; il a achevé un bac scientifique au cours duquel il a pu se frotter à Python. Son bac en poche, il entame des études d’ingénieur à Lyon… et puis la pandémie survient et avec elle les cours en ligne… Déçu par ce mode d’apprentissage, il décide de s’inscrire aux tests pour 42 Lausanne et il est maintenant de la première piscine. Ses premières impressions sont positives. «J’aime que l’on puisse choisir librement ses activités et que l’on nous demande de se corriger entre pairs», explique-t-il. Et d’ajouter: «On peut travailler à son rythme; certains font plusieurs pauses, d’autres travaillent 10 heures d’affilée».
Cette liberté a également pesé dans le choix de Y., 21 ans, qui vit dans le canton de Vaud. Il connaît très bien le domaine puisqu’il a terminé un apprentissage en informatique assorti d’une maturité professionnelle. Après quelques années dans une entreprise IT de la région, il décide de poursuivre son cursus à la HEIG-VD en emploi, mais la formation ne correspond pas à ce qu’il s’imaginait. Il a entendu parler de 42, le modèle lui plaît, il s’y inscrit. Il apprécie lui aussi que l’école lui permette d’aller à son rythme et ne pas devoir suivre celui de toute une classe. «J’ai beaucoup appris en autodidacte, j’y suis habitué», explique-t-il.
Autodidacte, F. l’est aussi. Le troisième étudiant que nous rencontrons a 25 ans et vit en Valais. Après avoir travaillé dans la vente multimédia, ils rejoint une société d’hébergement et il est aujourd’hui employé dans le service de support IT aux utilisateurs d’une multinationale. Tour au long de son jeune parcours, F. n’a pas cessé de se former: il a notamment suivi des cours réseau à la HES-SO et la formation en ligne de développeur web proposée par l’Extension School de l’EPFL. A ces cours à distance, il préfère néanmoins ce qui l’attend à 42, même s’il sait que ce seront quatre semaines intenses, avec peu de sommeil: «Lorsque l’on est pris par un challenge, il arrive que l’on perde la notion du temps», confie-t-il.
A converser avec les trois jeunes recrues de 42 Lausanne, les même motifs reviennent: l’envie de se former, le goût de l’autonomie et celui d’apprendre avec leurs pairs - précisément la recette de 42. Après à peine plus de 24 heures passées dans la piscine, leurs impressions se rejoignent aussi: «tout le monde se parle et échange», «on s’entraide spontanément avec ceux qui sont assis près de nous».
Et après?
Pour le tiers environ des étudiants qui parviendront à être sélectionnés à la fin de ce mois de piscine intensive, la formation commencera en octobre. Après un tronc commun d’une année pour apprendre à développer, ils partiront en stage dans une entreprise de la région. Ensuite, les choses sont très ouvertes: certains développeurs seront embauchés et recevront un certificat de 42. D’autres poursuivront leur formation à plein temps, en parallèle ou par intermittence, au gré de leurs goûts ou besoins. L’école propose de multiples spécialisations et un total de 21 niveaux avec un diplôme de développeur senior à la clé, ou de développeur junior pour ceux qui quittent l’école après 16 niveaux.
Pour ces futurs développeurs rompus à l’apprentissage en continu, au travail d’équipe et à la résolution de problème, les débouchés ne devraient pas manquer. F. se verrait bien dans le domaine de la cybersécurité, G. dans une petite boîte avec une atmosphère à la 42, et Y. aimerait travailler, voire monter une entreprise dans le domaine de l’informatique embarquée pour l’automobile…