Tous typographes avec Fontself
Installée à Renens, la start-up Fontself veut permettre à tout un chacun de créer sa propre police de caractères et d’envoyer ainsi des messages originaux et personnalisés. Rencontre avec Franz Hoffman, cofondateur de la société, qui a pour ambition de faire entrer Fontself partout où il y a du texte.
Qui n’a jamais fait le tour des alphabets préinstallés sur son ordinateur sans vraiment être satisfait pour finalement se rabattre sur une police basique en pestant? Chez Fontself, une start-up installée à Renens, aucune chance que cela ne se produise, quand les membres de la société veulent un alphabet, ils le conçoivent eux-mêmes. Pour cela, ils ont développé une application qui permet de créer des polices de caractères de façon simplifiée à partir d’images numérisées. Fondée par Franz Hoffman, designer de l’Ecole cantonale d’art de Lausanne (ECAL) et Marc Escher, informaticien, Fontself est née du constat qu’il n’existait aucune solution intuitive pour créer un alphabet. «C’est quelque chose qui est relativement technique», explique Franz Hoffman. «Il faut avoir une bonne connaissance des dessins de caractères et des outils de développement. Nous voulions au contraire que cela soit très spontané.»
Du projet à la démocratisation des alphabets personnalisés
Après avoir travaillé plusieurs mois à trouver une solution qui répondrait à leurs attentes, les deux fondateurs de la société ont présenté pour la première fois leur projet à Lift07. L’idée: permettre à quiconque de prendre un stylo, de dessiner des lettres et de pouvoir les utiliser sur le web. Au début, Franz Hoffman fait le tour des instituts culturels suisses pour obtenir des financements. Toutefois, bien que les premiers retours d’utilisateurs soient positifs tant du côté des particuliers que des professionnels, les financements ne sont pas au rendez-vous. «Nous nous sommes rendus compte que le meilleur moyen de faire naître un projet tel que le nôtre était de créer une société.» C’est donc chose faite en 2008 et la start-up de s’installer à Martigny, profitant de l’aide et des infrastructures mises à disposition par le canton du Valais ainsi que de la présence de plusieurs autres start-up au sein de l’Idiap. Aujourd’hui, la société compte huit personnes à temps plein et fait appel à des free-lances pour dessiner de nouvelles polices et pour les travaux administratifs. Elle est désormais installée dans les Ateliers de la ville de Renens et vient de franchir une première étape. Mi-mai, la société a lancé ses applications en ligne sur Facebook, Yahoo! Mail, MySpace, Netlog et Blogger. Les internautes peuvent y utiliser gratuitement le catalogue d’alphabets élaborés par Fontself pour poster des messages, envoyer des courriels originaux ou encore créer des smileys personnalisés. Une deuxième phase du projet réside dans la possibilité de créer un alphabet simplement avec son stylo, avec la souris ou avec une tablette graphique.
Un modèle d’affaires «freemium»
«Nous voulons couvrir toutes les surfaces où il y a du texte. Pour cela, nous devons donc développer une technologie ouverte qui soit la plus universelle possible pour que n’importe quel développeur ou partenaire puisse intégrer Fontself facilement sur sa plateforme.» Techniquement, l’application utilise Adobe Flash tant pour le contenu que pour l’affichage. Un choix qui, selon le cofondateur, s’explique par le fait que cela reste un des éléments les plus utilisés sur le web et que Flash offre une richesse de développement encore inégalée. Les alphabets sont stockés sur le cloud. L’application est accessible gratuitement sur internet. La société se base sur un modèle d’affaires «freemium», une contraction de free et premium, c’est-à-dire un modèle qui combine une offre gratuite, en libre accès, avec une offre premium, haut de gamme, en accès payant. Fontself développera donc des fonctionnalités additionnelles spécifiques dont elle ne veut rien dévoiler pour le moment. Pour ce faire, la société vient d’obtenir un financement de l’Index Ventures seed fund ainsi que de Business Angels européens.
Une tradition typographique suisse mise à l’épreuve
Que pensent les typographes traditionnels suisses de cette start-up? Franz Hoffman conçoit que l’approche de son entreprise n’est pas très orthodoxe vis-à-vis de la grande culture typographique suisse qui est très carrée et très rationnelle: «Au début, c’était même un pied de nez à tout cela de dire que nous avions envie de quelque chose de plus personnel et de plus intuitif.» Les deux cofondateurs se sont interrogés à un moment donné sur l’opportunité de conserver cet outil pour eux-mêmes et de proposer la création de polices de caractères comme service. Ils ont finalement décidé de diffuser leur solution plus largement au risque de s’exposer aux critiques. «Les typographes nous ont dit que des alphabets affreux allaient émerger. Mais nous pensons que si les internautes s’approprient les alphabets, de bonnes choses vont également naître et il s’agira alors de conserver uniquement ce qui se fait de mieux.»
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