Les défis des CIO en 2017: organiser l’innovation et bétonner la sécurité
La transformation numérique et la sécurité occupent le haut de l’agenda 2017 des responsables IT suisses. L’intérêt pour des technologies disruptives, telles que l’intelligence artificielle est également en hausse.
L’impératif de la transformation numérique est au sommet de l’agenda des CIO suisses pour 2017. Un tiers des responsables IT romands interrogés par ICTjournal considère même que c’est leur première priorité. Un résultat attendu, sachant que, dans un sondage réalisé par Deloitte, une large majorité des CIO suisses juge que la menace de concurrents innovants a augmenté ces deux dernières années.
L’autre évolution marquante de notre enquête concerne la sécurité. Seul un responsable IT de notre échantillon n’y voit pas une priorité élevée. 2016 est passé par là avec de multiples cas de données volées et autres attaques DDoS rendues publiques. Un responsable IT confiait récemment à notre rédaction combien la fonction de CIO est aujourd’hui un fusible tout désigné en cas d’incident sécuritaire. Et le risque à la réputation va encore s’accroître avec l’entrée en vigueur au printemps 2018 du Règlement européen sur la protection des données qui obligera les entreprises suisses actives en Europe de notifier les cas de fuites de données clients.
Intérêt croissant pour les technologies disruptives
Au chapitre technologique, notre sondage indique qu’une utilisation croissante des solutions SaaS et des outils collaboratifs «sociaux», qui sont déployés dans deux fois plus d’entreprises qu’il y a un an.
D’autres domaines plus récents, comme le Big Data, l’internet des objets et les wearables sont, comme l’an dernier, dans le radar de nombreuses entreprises, mais leur adoption n’a pas progressé. L’évolution la plus marquante concerne l’intelligence artificielle qui intéresse 61% des CIO sondés, soit deux fois plus que l’an dernier. Les analystes de Gartner et de Forrester y voient d’ailleurs l’une des technologies stratégiques pour 2017, avec l’internet des objets et la réalité virtuelle.
Là aussi, il sera intéressant d’analyser dans une année si cet intérêt pour l’intelligence artificielle débouche sur des projets pilotes et des déploiements. Sachant que, paradoxalement, seul un responsable IT sur dix considère qu’il est hautement prioritaire d’investir dans des technologies émergentes.
Manque de moyens et de temps
Les départements IT n’auront guère davantage de moyens qu’en 2016 pour réaliser leurs projets d’innovation et de transformation numérique. Selon le cabinet de recherche MSM Research, les dépenses IT des sociétés suisses augmenteront de 1,9% en moyenne en 2017. Et, l’écrasante majorité des CIO romands que nous avons sondés indiquent des budgets équivalents à ceux de 2016. A cela s’ajoute que, selon Capgemini, les dépenses pour les mises à jour, mises à niveau et extensions absorbent une part croissante des budgets au détriment des projets d’innovation. En cause, la réduction des cycles de release logiciels et le fait que la digitalisation accroît le nombre d’applications et donc la complexité. «Les CIO sont plus que jamais sollicités pour poursuivre la digitalisation de leur entreprise. Une grande part des budgets IT est néanmoins absorbée par le maintien des opérations quotidiennes. Le solde ne suffit pas pour soutenir la conception de nouveaux modèles d’affaires via l’innovation, si bien que ces dépenses sont de plus en plus reprises par les métiers», explique Srinivas Rao, Vice President chez Capgemini Suisse.
Outre les contraintes budgétaires, l’innovation butte également sur des obstacles organisationnels. D’après l’étude de Deloitte, l’innovation est surtout freinée par le manque de temps (74% des CIO suisses), la faible tolérance à l’erreur et le manque de talents. Dans la même étude, plus de la moitié des responsables IT jugent que «des années de réduction des coûts et des risques ont fait qu’il est difficile de développer des capacités d’innovation». Avec le danger que l’innovation IT ne soit finalement confiée à un autre département.
Réorganiser et simplifier pour innover
«Il faut se libérer du temps, nous confiait en septembre dernier Frédéric Wohlwend, CIO de Waypoint. Pour y parvenir, il faut s’organiser différemment et simplifier, drastiquement». De fait, deux tiers des responsables IT romands jugent qu’il est prioritaire de simplifier et d’industrialiser leur infrastructure, là aussi un bond par rapport à l’an dernier. Toutefois, seule une minorité des entreprises sondées recourent aujourd’hui à des services IaaS et PaaS ou à des infrastructures software-defined. Idem pour les outils permettant d’agiliser l’environnement applicatif, comme les micro-services et les containers.
Outre la simplification de l’infrastructure et des applications, la transformation numérique implique aussi que l’IT évolue d’une fonction de support vers un rôle pro-actif de concepteur de solutions. Or, d’après notre enquête, la réponse aux nouvelles demandes du business est considérée comme prioritaire par rapport à la création de nouveaux produits et services basés sur les données.
Signe positif, l’étude menée par Deloitte indique que les CIO suisses veulent développer une approche plus formelle de l’innovation. D’ci deux ans, 80% d’entre eux prévoient de disposer d’une stratégie approuvée en la matière, et la même proportion compte développer des processus et un pipeline d’innovations formalisés.