Facebook sort le joker suisse pour rassurer sur sa cryptomonnaie
Facebook veut dissiper les craintes engendrées par la libra. Le réseau social explique ainsi qu’il compte discuter avec la FINMA d’un cadre réglementaire approprié pour encadrer sa cryptomonnaie. Une supervision du Préposé fédéral à la protection des données est aussi prévue, ajoute le Genevois David Marcus, responsable des activités blockchain de Facebook.
Facebook donne des éclaircissements sur son projet de cryptomonnaie libra, suite aux critiques des banquiers centraux et des parlementaires américains. «Facebook n'offrira pas la monnaie numérique libra tant que nous n'aurons pas répondu à toutes les préoccupations réglementaires et obtenu les approbations appropriées», explique le Genevois David Marcus. Celui qui est aux commandes du projet de cryptomonnaie de Facebook a communiqué sa prise de position dans le cadre de son audition à la Commission bancaire du Sénat américain. Dans une lettre adressée au réseau social, celle-ci déclarait notamment: «Il semble que ces produits pourraient mener à un système financier mondial entièrement nouveau, actif depuis la Suisse, et destiné à rivaliser avec la politique monétaire américaine et le dollar. Ce qui soulève des préoccupations importantes en termes de privacy, de commerce, de sécurité nationale et de politique monétaire non seulement pour les 2 milliards d'utilisateurs de Facebook, mais aussi pour les investisseurs, les consommateurs et l'économie globale.»
Discussions avec la FINMA
Dans sa prise de position, David Marcus souligne que Facebook ne compte pas entrer en concurrence avec les monnaies souveraines ni interférer avec la politique monétaire. Il rappelle que la monnaie virtuelle du réseau social sera gérée par l’association Libra, basée à Genève. C’est donc la Suisse qui va superviser et encadrer la libra. L’association compte en effet être «autorisée, réglementée et soumise à une supervision» par l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA). David Marcus n’évoque toutefois pas explicitement la nécessité d’obtenir une licence bancaire: «Nous avons eu des discussions préliminaires avec la FINMA et nous comptons nous engager avec elle sur un cadre réglementaire approprié pour la Libra Association.»
Supervision du Préposé fédéral à la protection des données
Facebook sort aussi le joker suisse en matière de protection des données des utilisateurs de la cryptomonnaie: le Préposé fédéral à la protection des données sera amené à superviser les aspects assurant que l’association ne puisse pas monétiser les données sur la blockchain sous-tendant les transactions de la libra. «L'Association ne conservera pas séparément les données personnelles des utilisateurs de la blockchain, quelle que soit la manière dont elles pourraient être collectées, et ne gérera aucune infrastructure», argumente encore David Marcus à l'intention de la Commission bancaire du Sénat américain.
L’association Libra va en outre s’inscrire au FinCEN, bureau du département du Trésor aux Etats-Unis qui lutte contre le blanchiment d'argent, le financement du terrorisme et d'autres crimes financiers. Filiale de Facebook qui va éditer un porte-monnaie numérique dédié à la libra, Calibra est enregistré auprès du FinCEN à titre d'entreprise de services monétaires.
Reste à voir si ces explications vont apaiser les craintes suscitées par l’annonce de la libra, dont le lancement est initialement prévu pour 2020. Les parlementaires américains et, plus globalement, la plupart des banques centrales et institutions en charge des politiques monétaires ont accueilli fraîchement le projet de cryptomonnaie né chez Facebook. A l'instar de la Fed (la Réserve fédérale américaine), dont le Président Jerome Powell a récemment déclaré que le projet de Facebook suscite de nombreuses préoccupations concernant les problématiques de protection de la vie privée et de blanchiment d'argent, ainsi que pour la stabilité financière globale.