Les lacunes aberrantes de la collecte de données à l’OFSP
En l’absence de plateforme numérique et centralisée pour collecter les données auprès des médecins et des hôpitaux, l’OFSP n’est plus en mesure d’avoir une idée précise de l'étendue de l’épidémie de coronavirus. Le nombre d’infections va même jusqu’à être estimé en pesant les piles de formulaires reçus, selon une enquête du média alémanique republik.ch.
Faute de numérisation et de solution moderne de collectes de données, l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) peine à connaître la situation réelle de l’épidémie de coronavirus sur l’ensemble du territoire suisse. Il ne serait ainsi plus possible de savoir précisément le nombre de personnes testées positivement ou négativement au coronavirus. Selon une enquête menée par le média alémanique republik.ch, la consolidation des statistiques présente de graves manquements. Le processus de déclaration serait obsolète et l’infrastructure informatique dépassée, selon les employés des services concernés qui parlent d’une «bataille de papier comme dans un film des années 80 ». Résultat, l’OFSP ne disposerait d’informations complètes que dans 30% des cas.
Pas de solution centralisée
Il n’existe pour l’heure aucun système informatique permettant la saisie décentralisée des données dans toute la Suisse. Bien que cela soit en discussion depuis 2014, le porte-parole de l'OFSP Daniel Dauwalder explique dans les colonnes de republik.ch que «la transmission électronique est un projet à long terme qui ne peut être accéléré en raison de la situation actuelle».
Les médecins et les hôpitaux doivent donc se contenter d’envoyer leurs données à l’OFSP, qui doit ensuite les saisir manuellement dans sa base de données. En l’absence de plateforme numérique, les résultats des tests de dépistage du COVID-19 sont envoyés par fax, courrier ou email, le plus souvent sans être cryptés. En outre, un fax sur dix n’arriverait pas à destination, sans compter les problèmes d’écriture manuscrite illisible ou tout simplement l’absence de télécopieurs dans certains cabinets. Par conséquent, la pile de dossiers non traités augmente et pousse le personnel à prendre des décisions extrêmes, comme devoir peser les formulaires reçus pour en déterminer le nombre.
Des conséquences graves
Désormais, selon republik.ch, l’OFSP n’aurait plus connaissance du nombre de personnes hospitalisées et guéries, ou encore de résultats cliniques comme la gravité de la maladie, l'état des patients, leur histoire, etc. Par exemple, le 15 mars, l’OFSP a annoncé un bond de 800 nouvelles infections. Or, il ne s’agit pas du nombre de cas relevés ce jour-là, mais des formulaires reçus. Pire, les statistiques officielles était encore récemment tirées de Wikipédia. Une absence de chiffres et de connaissances complètes sur la véritable situation de l'épidémie qui rend les prises de décisions politiques encore plus compliquées.
Le département des systèmes de déclarations de l’OFSP est débordé par l'ampleur de la tâche. En effet, seuls neuf collaborateurs seraient responsables de la collecte et de la gestion des données. «Tout le monde fonctionne à ses limites et est submergé par le travail», rapporte un employé. «La qualité des données en souffre et toutes nos ressources sont gaspillées», conclut un autre.