Quand des champignons pilotent des robots
Une équipe de l'université Cornell a utilisé le mycélium de champignon pour piloter des robots biohybrides capables de réagir à leur environnement, ouvrant la voie à une robotique plus adaptative et sensible aux stimuli extérieurs.
Des champignons pour contrôler des robots? Ce concept a priori improbable fait pourtant l'objet d'une étude scientifique tout à fait sérieuse. Des chercheurs de l'université Cornell exploitent en effet les signaux électriques naturels du mycélium pour diriger des robots «biohybrides», selon un communiqué de l'institution académique située dans l’Etat de New York.
Les travaux des chercheurs sont publiés dans la revue Science Robotics. En introduction, ils expliquent que si de nombreux robots biohybrides sont alimentés par des cellules animales ou végétales, les champignons se distinguent par leur robustesse et leur longévité, même dans des conditions extrêmes. Le mycélium, qui permet aux champignons de communiquer et de se connecter sous terre, peut à la fois détecter l'environnement et émettre des signaux électriques, à l'instar des neurones du cerveau humain.
Du mycélium dans les composants électroniques
Les scientifiques ont collaboré avec des experts interdisciplinaires pour réussir à intégrer des champignons dans deux types de robots: l'un inspiré d'une étoile de mer, avec des matériaux flexibles, et l'autre équipé de roues. En faisant pousser du mycélium directement dans les composants électroniques, les chercheurs ont permis à leurs prototypes de réagir à des stimuli externes. Dans le cadre de leurs travaux, ils ont utilisé la lumière comme entrée sensorielle, avec l'intention d'expérimenter des entrées chimiques à l'avenir. Une interface a été développée pour mesurer les potentiels électrophysiologiques. Un module de contrôle basé sur les pics de tension rythmiques du mycélium vivant a ensuite été conçu pour contrôler la locomotion des robots.
Les chercheurs ont soumis leurs machines à trois expériences. Tout d'abord, les robots ont respectivement marché et roulé en réponse à des pics de signaux naturels émis par le mycélium. Ensuite, les machines ont été exposées à la lumière ultraviolette, ce qui a provoqué un changement dans leur démarche, démontrant ainsi la capacité du mycélium à répondre à des stimuli environnementaux. Enfin, les chercheurs ont réussi à prendre le contrôle total du signal natif du mycélium.
Perspectives inédites dans l'agriculture
Ce genre de robots biohybrides pourraient être mieux adaptés à des tâches complexes dans des contextes où les robots purement électromécaniques montrent leurs limites. «Ces robots pourraient potentiellement être utilisés pour détecter la chimie du sol et décider, par exemple, quand ajouter des engrais, contribuant ainsi à limiter les effets négatifs de l'agriculture, tels que la prolifération d'algues nuisibles», explique Rob Shepherd, professeur à l'institut d'ingénierie de Cornell et impliqué dans ces recherches qui ouvrent la voie à une nouvelle génération de machines sensibles à l'environnement.