Comment Swisscovid va estimer les contacts à risque
Swisscovid est officiellement lancée. Promettant de pallier aux faiblesses du traçage humain, l’app de la Confédération enregistre les contacts à proximité de ses utilisateurs pour les notifier en cas de risque. Décorticage du mécanisme qui transforme un signal Bluetooth en indicateur de risque de contamination.
Swisscovid est dans les bacs, ou plutôt dans les app stores iOS et Android. L’application de traçage de la Confédération doit permettre de notifier des personnes ayant été en contact avec un individu contaminé. Et, dans le sens contraire, permettre aux utilisateurs testés positifs d’alerter les anonymes qu'ils ont croisés.
Du signal Bluetooth à la distance (probable)
Selon le texte adopté par le parlement, l’application Swisscovid promet d’enregistrer les rapprochements remplissant les conditions épidémiologiques, à savoir une distance de 1,5 mètre ou moins pendant une durée de 15 minutes au cours de la même journée.
Pour calculer les rapprochements entre smartphones, l’application s’appuie sur la force du signal Bluetooth, telle qu’elle est fournie par l’API d’Apple/Google. Dans une situation réelle, ce signal est perturbé par de multiples facteurs de sorte qu’il est difficile d’en déduire la distance séparant les smartphones. Pour les concepteurs du système, ce qui importe toutefois c’est moins de calculer la distance précise, que d’estimer si l’on a une certaine probabilité de se trouver dans le périmètre de risque épidémiologique, expliquent-ils dans un document transmis à notre rédaction par l’OFSP.
Faux positifs et faux négatifs
En jouant sur les paramètres appliqués aux données transmises par l’API, les concepteurs peuvent ainsi calibrer le système pour qu’il soit plutôt conservateur - on identifie seulement les personnes proches au risque d’en oublier certaines (faux négatifs) - ou au contraire plutôt souple - on identifie davantage de personnes au risque que certaines d’entre elles se trouvaient plus loin (faux positifs).
Avec les paramètres choisis par les concepteurs de Swisscovid, les tests ont montré qu’une personne sur trois identifiée comme étant dans un rayon de 1,5 mètre, se trouve en fait plus loin (33% des contacts pour une atténuation de 50dB, 45% pour 55dB). Les concepteurs soulignent toutefois que la plupart de ces faux positifs se trouvent à moins de 3 mètres.
A l’inverse, coté faux négatifs, la moitié des personnes avec lesquelles un rapprochement à risque a eu lieu, sont écartées par l’application telle qu’elle est calibrée (64% avec 50dB, 41% avec 55dB).
Au final, ces paramètres techniques ont ainsi des conséquences bien réelles pour l’utilisateur de Swisscovid. Les données fournies par l’app feront qu’une personne testée positive notifiera automatiquement des anonymes qu’ils courent un risque. Ou qu’un autre utilisateur se rassurera de voir que l’app ne lui envoie aucune alerte.
Traçage humain vs. traçage numérisé
Comme l’EPFL le souligne dans son communiqué, le traçage «manuel» a aussi ses défauts: on oublie les personnes que l’on a rencontrées et on ne connaît pas la plupart des usagers croisés dans les transports publics ou au restaurant. La précision, les fausses alertes et les cas ommis dépendent du jugement et de la mémoire plus ou moins bonne des individus testés positifs.
A l’opposé, l’app Swisscovid tournant en arrière-plan ne compte pas sur la mémoire de l’utilisateur, et fonctionne avec tous les contacts, qu’ils soient connus ou anonymes. Mais elle présente aussi des lacunes, comme le fait d’être aveugle aux circonstances particulières de proximité, telles que le port d’un masque ou la présence d’une vitre. La précision, les fausses alertes et les cas ommis dépendent de la mécanique et du calibrage probabiliste intégrés lors de sa conception.